IV
Ulver Seich se réveilla de la meilleure manière possible, faisant surface avec une lenteur langoureuse à travers des couches vaporeuses de demi-rêves voluptueux et de demi-souvenirs sensuels assortis de tendresse et de pur plaisir charnel, pour s’apercevoir que tout cela se fondait parfaitement dans la réalité présente, dans ce qui était en train de lui arriver.
Elle joua un instant avec l’idée de feindre d’être encore endormie, mais il dut la toucher, à ce moment-là, exactement au bon endroit, et elle ne put s’empêcher de laisser échapper un gémissement, de remuer et de le serrer dans ses bras, et elle roula sur le côté, lui prit le visage entre ses mains et l’embrassa.
— Oh non ! s’étrangla-t-elle en riant. N’arrête pas ! C’est la meilleure manière de me dire bonjour.
— Bon après-midi, presque, murmura le jeune homme.
Il s’appelait Otiel. Il était grand et de teint très foncé, avec de fabuleux cheveux blonds et une voix qui vous donnait la chair de poule à des dizaines de mètres ou, mieux encore, à des millimètres. Il étudiait la métaphysique. Il pratiquait beaucoup la natation et l’escalade libre. Elle avait jeté son dévolu sur lui la veille. Il aimait ses jambes, et ses doigts étaient longs, fins et sensibles…
— Mmm… Quoi ? Oui, tu me diras ça plus tard… Pour le moment, continue de… HEIN ?
Elle se dressa en position assise, comme un ressort, les yeux grands ouverts. D’une tape, elle écarta la main du jeune homme et jeta autour d’elle un regard frénétique. Elle était dans ce qu’elle considérait comme son lit romantique. À lui seul, c’était presque une chambre ; large de cinq mètres, de couleur écarlate, surmonté d’un dais ruché, hémisphérique, il était garni de traversins onduleux et de draps soyeux qui se prolongeaient en tentures moelleuses formant l’unique mur de la chambre et renflées par endroits pour former différentes saillies, tablettes et poufs. Elle avait d’autres lits que celui-là : son lit d’enfant encore encombré de peluches et de jouets ; son lit Juste Pour Dormir, confortable et entouré de plantes nocturnes ; un lit de « réception » à baldaquin, énorme, formel et terriblement démodé, pour recevoir des amis, et un lit d’huile, qui consistait principalement en une sphère de quatre mètres de diamètre, remplie d’huiles tièdes, qui nécessitait que l’on se mette dans les narines de petites canules permettant de respirer de l’air Déplacé. Cela ne correspondait certes pas au goût de tout le monde, mais c’était d’un érotisme torride.
Son lacis neural s’était déjà activé sous la montée d’adrénaline. Il lui apprit qu’il était midi moins vingt-cinq. Merde ! Elle croyait l’avoir réglé pour qu’il la réveille une heure plus tôt. Elle en avait vraiment eu l’intention. Elle avait oublié, sans doute dans le feu de l’action ; reprioritisation hormonale. Bah ! Ces choses-là arrivaient parfois.
— Qu’est-ce qu’il y a ? demanda Otiel sans cesser de sourire.
Il la regardait bizarrement, comme s’il se demandait si cela faisait partie d’un jeu. Une lueur s’alluma dans son regard. Il tendit la main pour la toucher.
Zut ! La gravité était toujours à un. Elle ordonna aux commandes du lit de la réduire à un dixième de g.
— Désolée ! dit-elle.
Elle lui envoya un baiser, le doigt sur les lèvres, tandis que leur poids apparent diminuait brusquement de quatre-vingt-dix pour cent et que la literie, sous eux, se gonflait, ce qui eut pour effet de les faire flotter vers le haut. Il prit un air surpris ; c’était une mimique de petit garçon si charmante et si innocente qu’elle faillit rester un peu plus.
Mais elle ne le fit pas ; d’une poussée du talon, elle se propulsa dans les hauteurs du lit, les bras levés, pour passer à travers les draperies qui formaient le plafond de la chambre et redescendre au niveau de la plate-forme capitonnée qui en faisait le tour. Là, elle retomba doucement dans une gravité standard. Elle descendit les marches courbes de la chambre à coucher et faillit se heurter au drone Churt Lyne.
~ Je sais ! dit-elle en le repoussant de la main.
Le drone se souleva pour la laisser passer. Puis il décrivit une courbe et la suivit sur le sol de la chambre en direction de la salle de bains. Ses champs étaient d’un bleu dense, mais teinté de rose sur les bords.
Elle se mit à courir. Elle avait toujours aimé les grandes pièces. La chambre à coucher faisait vingt mètres de côté sur cinq de haut. La fenêtre occupait un mur entier. Elle donnait sur un paysage vallonné de prairies et de collines boisées ponctuées de tours et de ziggourats. C’était l’Espace Intérieur Numéro Un, le plus central et le plus long des cylindres d’un bouquet de tubes de cinq mille mètres de diamètre, en rotations indépendantes, qui formaient les principaux quartiers d’habitation du Roc.
— Y a-t-il quelque chose que je puisse faire ? demanda le drone.
Ulver entra en courant dans la salle de bains. Elle entendit un grand cri et une série de jurons derrière elle tandis que le jeune homme essayait de sortir du lit de la même manière qu’elle et se heurtait au changement de gravité. Le drone se tourna un instant vers la zone de commotion. À travers les bruits d’eau, la voix d’Ulver lui parvint.
— Tu peux t’occuper de l’éjecter. Mais gentiment, s’il te plaît !
— Quoi ? hurla Ulver. Tu me fais éjecter un nouveau mec pulpeux après une seule nuit, tu me fais annuler tous mes engagements pour un mois, et je n’ai même pas le droit d’emmener quelques petits compagnons ? Ou deux ou trois copains ?
— Ulver, est-ce que je peux te parler en privé ? demanda calmement Churt Lyne en pivotant pour indiquer une chambre adjacente à la galerie principale.
— Non, tu ne peux pas ! hurla-t-elle en jetant par terre le manteau qu’elle avait sous le bras. Si tu as quelque chose à dire, tu n’as qu’à le faire devant mes amis.
Ils se trouvaient dans la galerie extérieure d’Iphetra, une longue zone de réception aux parois tapissées de vieux tableaux, aux fenêtres donnant sur les jardins aménagés et sur l’Espace Intérieur Numéro Un. Deux transtubes attendaient derrière des portes qui s’ouvraient dans le mur des tableaux. Elle avait demandé à tout le monde de la retrouver ici à midi. Elle avait raté son rendez-vous d’une heure, mais il y avait certaines choses, quand on faisait sa toilette, qui ne pouvaient être précipitées. Sans compter que, si elle était tellement importante pour tous leurs projets secrets – comme elle l’avait dit depuis son bain de lait à Churt Lyne, qui enrageait furieusement mais intérieurement – les CS n’avaient d’autre choix que de l’attendre. En guise de concession à l’urgence de la situation, elle ne s’était pas maquillée, avait noué simplement ses cheveux en un chignon et avait enfilé un pantalon ample, aux motifs traditionnels, avec sa jaquette assortie ; même le choix de ses bijoux pour la journée ne lui avait pas pris plus de cinq minutes.
La galerie était devenue le siège d’une activité intense ; sa mère était là, grande et débraillée dans sa djellaba, plus trois cousins, sept tantes et oncles, une douzaine d’amis – tous logés chez elle et un peu éprouvés après la soirée de célébration de la remise des diplômes –, et deux drones asservis à la maison, qui essayaient de retenir les animaux : un couple de speytlids de chasse de couleur fauve, l’écume à la gueule, qui regardaient tous ceux qui étaient là en reniflant bruyamment d’excitation, et ses trois alseyns à la tête encapuchonnée mais très nerveux quand même, qui ne cessaient de déployer leurs ailes et de faire entendre leurs cris perçants et plaintifs. Un troisième drone attendait devant une fenêtre voisine avec Brave, sa monture préférée, toute sellée, piaffante d’impatience. Trois drones, c’était le minimum indispensable dont elle avait décrété qu’elle avait besoin pour s’occuper de ses bagages, qui continuaient d’arriver par l’ascenseur. À côté d’elle flottait un plateau garni d’un petit déjeuner ; elle venait de mordre dans un morceau de chislen lorsque le drone lui avait annoncé qu’elle devrait voyager seule.
Churt Lyne ne lui répondit pas vocalement. Il la surprit en communiquant avec elle par l’intermédiaire de son lacis neural.
~ Ulver, par pitié ! C’est une mission secrète que tu vas accomplir pour les Circonstances Spéciales, et non pas une sortie avec tes amies !
— Ne me parle pas comme ça ! souffla Ulver à travers ses dents serrées. Tu n’as donc aucun sens des convenances ?
— Tu as raison, ma chère, lui dit sa mère en étouffant un bâillement. Ça ne se fait pas !
Des rires cristallins éclatèrent parmi ses amies.
Churt Lyne s’approcha d’elle jusqu’à ce qu’ils se touchent presque et tout à coup, une sorte de cylindre gris se forma autour d’eux, du plancher de bois au plafond de pierre taillée. Il faisait environ un mètre cinquante de diamètre et n’englobait que Churt, elle, et le plateau de son petit déjeuner. Elle regarda le drone, la bouche ouverte, les yeux agrandis. C’était la première fois qu’il faisait une chose pareille. Son champ-aura avait disparu. Il n’avait même pas eu la décence de carrer le champ ni de lui donner un fini miroir ; elle aurait pu au moins vérifier son apparence.
— Désolé d’avoir dû faire ça, Ulver, dit la machine d’une voix qui résonnait mal dans l’étroit cylindre.
Ulver ferma d’abord la douche. Puis elle toucha le champ que le drone avait projeté autour d’eux. Au contact, c’était comme de la pierre chaude.
— Ulver, répéta le drone en lui prenant la main dans son plurichamp, je te demande pardon. J’aurais dû te l’expliquer plus tôt. Je m’étais dit que… Peu importe. Je t’accompagne dans ce voyage aux Gradins, mais personne d’autre ne peut venir. Tes amis doivent rester ici.
— Mais Peis et moi nous prenons toujours l’espace ensemble ! Et Klatsli est ma nouvelle protégée ! Je lui ai promis qu’elle ne me quitterait pas. Je ne peux pas la laisser tomber comme ça ! Tu te rends compte des conséquences pour son évolution ? Pour sa vie sociale ? Les gens risquent de croire que je l’ai abandonnée ! En plus, elle a un frère aîné charmant comme tout ! Si je…
— Tu ne peux pas les emmener ! fit le drone d’une voix ferme. Il n’y a de place pour aucun invité !
— J’ai respecté ce que tu m’as demandé hier, tu sais, fit Ulver en secouant la tête et en se penchant en avant vers le drone. De garder le secret. Je n’ai dit à personne où nous allons.
— Là n’est pas la question. Quand je te demande de ne rien dire à personne, ça ne signifie pas seulement ne pas dire où tu vas, ça signifie ne pas dire que tu t’en vas.
Elle éclata de rire en renversant la tête en arrière.
— Sois un peu sérieux, Churt ! Mon agenda est un document public, tu ne l’avais pas remarqué ? Il y a au moins trois canaux qui me sont entièrement consacrés, tous tenus par des jeunes hommes empressés, je le reconnais, mais cela n’empêche pas que je ne peux pas changer la couleur de mes yeux sans que toutes les personnes du Roc qui s’intéressent de près ou de loin à la mode le sachent dans l’heure qui suit. Je ne peux pas disparaître comme ça ! Tu as perdu l’esprit ?
— Et je ne crois pas que les animaux puissent venir non plus, fit Churt Lyne d’une voix égale, ignorant sa question. Pas le protira, en tout cas. Il n’y a pas de place pour lui à bord.
— Pas de place ! s’exclama Ulver. Quelle est la taille de ce machin ? Tu es sûr qu’on ne risque rien ?
— Il n’y a généralement pas d’écuries à bord des vaisseaux de guerre, Ulver.
— C’est un ex-vaisseau de guerre ! s’écria-t-elle avec un grand geste de la main. Ouille !
Elle porta à sa bouche la phalange qui avait heurté la paroi du champ.
— Désolé, mais c’est comme ça, lui dit le drone.
— Et mes affaires ?
— Tu peux remplir une cabine de vêtements, si tu veux, mais je ne vois pas en l’honneur de qui tu vas les porter.
— Et quand j’arriverai aux Gradins ? Et ce type avec qui il faut que je baise ? Je suis censée me présenter devant lui toute nue ?
— Deux cabines. Trois, si tu veux. Les vêtements, ce n’est pas un problème. Tu en trouveras d’autres à l’arrivée. Non, attends. Je sais le temps que tu mets pour choisir des vêtements. Prends tout ce que tu voudras. Quatre cabines, là !
— Et mes amis ?
— Écoute, je vais te montrer l’espace que tu peux utiliser, d’accord ?
— D’accord, fit Ulver en secouant la tête avec un gros soupir.
Le drone lui transmit des images moins convaincantes de l’intérieur du vaisseau par l’intermédiaire de son lacis neural. Elle retint son souffle. Ses yeux étaient écarquillés à la fin. Elle lança à Churt Lyne un regard furieux.
— Ces cabines ! s’écria-t-elle. Elles sont bien trop petites !
— Exactement. Tu veux toujours emmener tes amis ?
Elle réfléchit quelques secondes.
— Oui ! hurla-t-elle en abattant le poing sur le petit plateau qui flottait à côté d’elle et qui vacilla en faisant des efforts méritoires pour ne pas renverser le jus de fruits. Ce serait super !
— Et si tu te fâches avec eux ?
Ces mots la prirent un instant de court. Elle se tapota la lèvre d’un doigt, les sourcils froncés. Puis elle haussa les épaules.
— Je peux faire abstraction des autres, même dans un transtube, Churt, dit-elle. Je peux faire comme s’ils n’existaient pas, même si je dors avec eux dans le même lit !
Elle se pencha de nouveau vers la machine, puis regarda la paroi grise du champ cylindrique.
— Même dans un espace aussi étroit que celui-ci, dit-elle d’un air entendu, les mains sur les hanches, je sais très bien me défendre. (Elle rejeta la tête en arrière, plissa les paupières et ajouta à voix basse :) Je pourrais refuser de partir, tu sais.
Le drone soupira.
— Tu pourrais, c’est vrai. Mais tu ne travaillerais plus jamais pour le Contact, et les CS seraient forcées de faire appel à un double, une entité synthétique, pour jouer le rôle de cette femme dans les Gradins. Les autorités locales ne plaisanteraient pas si elles s’en apercevaient.
Elle regarda quelques instants la machine, puis soupira et secoua la tête.
— Quelle chierie ! fit-elle en prenant le verre de jus sur le plateau flottant pour examiner avec dégoût l’endroit où le liquide avait coulé sur le côté. J’ai horreur de ces manigances d’adultes de merde, ajouta-t-elle en reposant le verre sans avoir bu. Mais d’accord, on n’a qu’à y aller, si c’est comme ça.
Les adieux durèrent pas mal de temps. Churt Lyne en devenait de plus en plus gris de frustration jusqu’à n’être plus qu’une sorte de sphère noirâtre ; puis il laissa tomber complètement son champ-aura et se précipita vers la fenêtre ouverte la plus proche. Il tourna quelque temps dans les airs : on entendit un double bang quand il franchit le mur du son et les montures faillirent s’emballer.
Finalement, quand Ulver, la seule à garder sa sérénité au milieu des effusions générales et des larmes versées par Klatsli, eut terminé ses adieux et consenti à laisser derrière elle deux malles et tous ses animaux, elle entra dans le transtube, suivie d’un Churt Lyne glacial couleur bleu givré, et fut conduite au Dock Avant, dans un hangar brillamment éclairé où l’attendait l’ex-Unité d’Offensive Rapide de classe Psychopathe Sincère Échange de Vues.
Elle éclata de rire en voyant le vaisseau.
— On dirait un gode, fit-elle en reniflant.
— La comparaison est appropriée, approuva Churt Lyne. Armé, il est capable de baiser des systèmes solaires entiers.
Elle se souvint du jour où, petite fille, elle était allée sur un pont franchissant des gorges profondes dans l’un des autres Espaces Intérieurs ; elle avait un caillou à la main, et sa mère l’avait hissée sur le rebord du parapet pour qu’elle puisse regarder en bas et laisser tomber le caillou dans le torrent noir qui coulait au fond. Elle avait porté le caillou – qui tenait à peine dans sa petite main – à hauteur d’un œil, et elle avait fermé l’autre, de sorte qu’elle ne voyait plus rien. Puis elle avait lâché le caillou.
Churt Lyne et elle se tenaient dans la petite soute du vaisseau, entourés de malles, de valises et de sacs, avec en plus du matériel militaire à l’air quelque peu menaçant. La manière dont la pierre était tombée, de plus en plus petite, vers les eaux noires ressemblait beaucoup à celle dont le Roc de Phage s’éloignait à présent silencieusement du vieux vaisseau de guerre.
Cette fois-ci, naturellement, il n’y eut pas de plouf.
Quand Phage eut entièrement disparu, elle éteignit la vue que son lacis neural avait importée dans sa tête et se tourna vers le drone avec une pensée qui aurait dû lui venir bien plus tôt, elle l’espérait, si elle avait été sobre et lucide ces deux derniers jours.
— Quand ont-ils envoyé ce vaisseau sur Phage, Churt ? Et d’où vient-il ?
— Pourquoi ne lui poses-tu pas la question directement ? fit la machine en indiquant un petit drone qui venait vers eux en survolant le matériel épars.
~ Churt ? demanda-t-elle en se servant du lacis neural.
~ Oui ?
~ C’est bête, j’espérais que le rep du vaisseau serait un beau jeune homme au lieu d’un vieux machin qui…
~ Ulver, l’interrompit Churt Lyne, est-ce que tu te rends compte que c’est le vaisseau lui-même qui sert de concentrateur dans ce genre de communication ?
~ Oh ! là là ! pensa-t-elle.
Elle se sentit rougir tandis que le petit drone s’approchait. Elle lui fit un large sourire.
— Je ne voulais pas vous offenser, dit-elle.
— Ce n’est rien, déclara la petite machine en s’arrêtant devant elle. Le drone avait une voix aiguë mais raisonnablement mélodieuse.
— Pour mémoire, déclara Ulver en souriant toujours, mais sans cesser de rougir, je vous signale que j’ai également pensé que vous ressembliez un peu à une boîte à bijoux.
— Ça aurait pu être pire, intervint Churt Lyne. Il faudrait que vous entendiez les mots qu’elle emploie pour me décrire, parfois.
Le court museau du petit drone s’inclina en une sorte de salut.
— Ne vous inquiétez pas, Ms Seich, dit-il. Je suis enchanté de faire votre connaissance. Permettez-moi de vous souhaiter la bienvenue à bord du Piquet Ultra-rapide Sincère Échange de Vues.
— Merci, dit-elle en hochant lentement la tête à son tour. J’étais justement en train de demander à mon ami d’où vous veniez et à quel moment on vous avait envoyé.
— Je ne viens de nulle part. J’étais déjà sur Phage.
Les yeux d’Ulver s’écarquillèrent.
— Vraiment ?
— Vraiment, répondit laconiquement le vaisseau. Et les réponses à vos trois prochaines questions, je pense, sont : premièrement, parce que j’étais bien caché, ce qui est relativement facile dans un amas de matière de la taille de Phage, deuxièmement depuis cinq cents ans, et troisièmement oui, il y en a encore quinze autres comme moi là-bas. J’espère que vous voilà rassurée plutôt que choquée, et que nous pourrons compter, à l’avenir, sur votre discrétion.
— Fichtre oui ! Tout à fait ! dit-elle en inclinant la tête.
Elle avait presque envie de claquer les talons et de saluer.